La reconversion professionnelle, une affaire de tripes!

Chercher une reconversion qui parle aux tripes plutôt qu'un projet prudent

 

 

Il suffit de lire les nombreux témoignages de reconversion aux antipodes de la carrière d’origine pour se convaincre qu’une reconversion n’est farfelue, irréaliste ou géniale que dans l’œil de celui qui la considère comme telle parce que ses convictions, bien plus que sa raison, l’y poussent. Il est largement temps de sortir du cadre frileux des encouragements à la reconversion la plus facile, pour aller chercher, littéralement, ce qu’on a vraiment dans le ventre, car c’est là que se trouve la force de renverser des montagnes. Ou d’en atteindre les sommets;)

 

Chercher une reconversion qui parle aux tripes plutôt qu'un projet prudent

 

Changer de métier: une question de tripes

J’ai été interviewée par Expectra sur le thème de la reconversion et la journaliste me fait dire qu’une “reconversion “coup de coeur” fonctionne mieux qu’une reconversion raisonnable“. Mes lecteurs habituels savent que le terme “coup de coeur” ne fait pas vraiment partie de mes champs sémantiques de prédilection. Gageons qu’il est le reflet des préférences lexicales de ladite journaliste, qui a peut-être trouvé que “une reconversion qui vient des tripes” – ce que j’avais dis dans l’ITW – faisait trop charcutier.

Au delà de l’anecdote amusante, remettons les pendules à l’heure, car le terme “coup de coeur” est malencontreux. Il est gentiment inscrit dans un discours de magazine féminin: on a un coup de cœur pour une paire de chaussure, pas pour un métier dont on veut faire carrière.

J’en reviens donc à la métaphore intestinale: une reconversion qui a des chances de réussir est une reconversion vers un métier qui vient des tripes, de cette panse qui pense bien mieux que notre tête, plutôt qu’à un changement de métier raisonné-raisonnable vers un job florissant en termes d’emploi ou qui correspond à ce que l’on sait déjà faire, mais qui ne résonne pas tant que ça à l’intérieur de nous.

 

Pourquoi la reconversion doit parler à nos tripes

Une reconversion qui parle à nos tripes, c’est celle qui nous fait vibrer quand nous y pensons ou quand nous en parlons, qui génère un enthousiasme et une énergie authentiques, visibles, palpables et communicatifs, que le projet soit estampillable “farfelu” ou pas.

Car ce n’est donc pas tant la nature du projet qui compte, que la motivation et la détermination qu’il suscite en nous. Je me souviens d’une spécialiste du traitement des eaux usées qui, quand elle racontait qu’elle “bossait dans la merde”, y mettait un bonheur serein et jubilatoire à la fois qui donnait juste envie de tout quitter pour aller travailler avec elle. Cette force vive qui se dégage d’une projet de reconversion issu du creux de nos tripes est probablement l’un des critères principaux pour avoir des chances de la mener à bien.

Cette motivation-là est de l’ordre de l’émotionnel et se situe rarement dans nos têtes raisonnables et rationnelles. Au fond de nos tripes, ce sont nos émotions qui s’expriment, et nos émotions savent bien mieux que notre raison ce qui est bon pour nous. Car nos convictions, que nous pensons tellement raisonnées, sont le fruit des préjugés dont nous sommes bombardés sur les risques, les difficultés, le réalisme etc. qui poussent notre raison à remettre nos envies, nos aspirations dans notre carton à rêves limites infantiles et de nous plier à la frilosité. Les cimetières sont pleins de rêves trop vite abandonnés. Inversement, une reconversion qui parle à nos tripes est tellement porteuse de sens à nous yeux qu’elle a de multiples bénéfices:

– Motivation: Elle génère une motivation et une détermination qui permettent de déplacer des montagnes. Le sens qu’elle porte suscite un sentiment d’utilité, de contribuer à plus grand que soi qui donne une grande force mentale.
– Stratégies: Elle engendre des trésors d’imagination et de dynamisme pour élaborer des stratégies de mise en oeuvre.
– Force de conviction: Le plaisir et la motivation qu’elle procure sont visibles et rendent beaucoup plus convaincant auprès des recruteurs, clients ou interlocuteurs professionnels.
– Energie et dynamisme: En s’appuyant sur les valeurs motrices et le sens, elle va générer ses propres sources d’énergie pendant tout le parcours et au delà, favorisant ainsi l’endurance et la capacité à rebondir lorsqu’on rencontre des difficultés.
– Confiance et assurance: Elle va puiser au fond du candidat une assurance et une confiance ultra utile face à tous les interlocuteurs professionnels. Cette foi en soi et en son projet donne une dimension sereine à la posture du candidat à la reconversion qui participe aussi de la gestion des périodes de doute.
– Plaisir et épanouissement: Elle garantit un plaisir au travail et des possibilités d’épanouissement professionnel qui favorisent le bien-être et le sentiment de satisfaction. Elle génère une capacité plus forte à gérer le stress et les aléas inhérents à la vie professionnelle.

lorsqu'un désir de reconversion émerge, écouter ses messages, qui ne veulent pas toujours dire qu'il faut changer de métier

 

Des tripes et des vaches: une reconversion réalisable

Avant de pousser des cris d’orfraie, entendons-nous bien: il ne s’agit pas de foncer tête baissée dans un projet qui nous titille sans l’avoir étudié de près, sous prétexte qu’il nous anime. C’est justement l’exploration concrète du projet qui va déterminer le degré de motivation tripale* qui reste, une fois confronté à la réalité et comment cette détermination va influer les solutions et stratégies à mettre en oeuvre, le rendant réalisable ou pas. En d’autres termes, c’est sur le plancher des vaches que la reconversion va exprimer sa motivation et son enthousiasme, pas dans les élucubrations d’une réflexion virtuelle qui nage un petit nuage tout rose.

La reconversion qui vient des tripes n’est pas nécessairement un projet passion. C’est un changement de métier qui plaît autant à notre deuxième cerveau (notre panse pleine de neurones émotionnels), qu’au principal (celui qui est bien calé entre nos deux oreilles), car elle réconcilie les deux. Cependant il n’y a pas nécessairement de corrélation entre passion existante et job idéal. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet.

On la reconnaît en ce qu’elle est (aussi parce que nous l’avons rendue) cohérente avec nos valeurs motrices, nos besoins, notre personnalité, notre définition de la réussite et du sens, bien plus qu’avec la “réalité du marché” et qu’elle génère une grande fluidité dans l’identification des étapes à franchir et des solutions et stratégies à mettre en oeuvre pour la faire vivre. Elle se détermine:

– En partant des idées qui vous viennent: ce que vous avez envie de faire, ce que vous aimez, ce qui vous motive…
– En explorant en détail les désirs professionnels  (expression personnelle des besoins génériques) de façon à voir en quoi il correspondent, ou pas au projet de reconversion.
– En cherchant des solutions pour adapter le projet de reconversion à ses besoins et aspirations, plutôt que l’inverse, donc en pratiquant le job crafting pour rendre le plaisir durable
– En explorant toutes les pistes, même les plus farfelues, de façon à en tirer les enseignements nécessaires et à déterminer la faisabilité d’un projet en fonction de celui qui le porte et de sa capacité à le mettre en oeuvre, plutôt que sur des jugements à l’emporte-pièce.
– En réfléchissant en termes de “comment je fais vivre mon projet” plutôt que “est-il réalisable!?”. Les stratégies générées ou pas seront un critère important de réalisation.
– En distinguant les compétences que vous aimez exercer de celles que vous ne supportez plus. En les utilisant pour appuyer votre projet et pas le contraire.
– En explorant les formations nécessaires, les compétences à acquérir, quitte à vous former et/ou à déléguer.
– En explorant les enjeux financiers, organisationnels, identitaires etc. des pistes, de façon à vérifier leur pertinence.
– En explorant ce que le candidat à la reconversion est prêt à mettre en oeuvre pour réaliser son projet, ou pas, plutôt qu’en plaquant des pseudo-vérités qui en détermineraient la faisabilité.

deux dimensions essentielles du changement de métier: idenitifer une voie de reconversion et en vérifier la pertinence et la faisabilité

Au final, cette exploration concrète du projet donne au candidat à la reconversion tout un pannel de critères qui lui permettent de décider en son âme et conscience la faisabilité de son projet, en apparence si tranquille ou rock’n’roll soit-il. Et cette évaluation-là est bien plus pertinente que celle, toute de préjugés, d’un consultant ou d’un test de personnalité. Des projets farfelus seront déclarés irréalisables, d’autres pertinents, de même que pour les projets plus prudents.

Ainsi par exemple, exit les “est-ce réaliste de reprendre 4 ans d’études plus un emploi à temps plein quand on a trois enfants en bas âge?”. La question à se poser est plutôt ” S’il faut 4 ans d’études, comment puis-je m’organiser, concrètement, pour concilier vie pro, vie perso et formation? Les solutions que je trouve, en quoi sont-elles satisfaisantes? Acceptables? Insurmontables? Est-ce un critère de renoncement ou non?”

 

Explorer tous les désirs de reconversion

Les projets professionnels audacieux qui réussissent ont tous un point commun: quelqu’un s’est décidé à les tenter. Si Michel et Augustin s’étaient préoccupé du “réalisme” version consultants dans un projet qui consistait à aller grignoter des parts de marché à l’industrie agro-alimentaire, il auraient probablement fait prudemment marche arrière. En s’intéressant à comment ils allaient s’y prendre plutôt qu’à “est-ce possible?”, ils se sont ouvert les portes d’une vie professionnelle en cohérence avec leur vision.

C’est la raison pour laquelle il convient d’explorer tous les désirs de reconversion, même et surtout celles que notre raison estampille “insensés” ou “peu réalistes” car chaque piste qui vous titille, à défaut d’être forcément la bonne, est a minima porteuse d’enseignements à intégrer dans le projet, quel qu’il soit.

D’autre part, dès lors qu’un désir de reconversion se fait sentir, il est probablement le signe d’une insatisfaction professionnelle qui mérite d’être étudiée, pour éviter de tomber dans la démotivation, la procrastination et le désengagement, voire le burnout, et au contraire trouver les moyens, via changement de métier ou pas, de (re)donner du son à son travail, de (re)trouver du plaisir au travail.

Trouver du sens à notre métier donne le sentiment d'être investi d'une mission qui donne motivation et engagement

A 45 ans, vous rêvez d’être agent double ou pilote de chasse? Il y a certes peu de chances d’y parvenir, mais les aspects qui vous intéressent dans ces métiers sont à creuser car ils cachent des éléments importants à vos yeux en termes de satisfaction professionnelle, qui sont à prendre en compte.

Vous vous imaginez psychologue, plombier ou éleveur de chèvres alors que vous êtes directeur informatique ou responsable com? Qui pourrait juger du réalisme ou de l’irréalisme d’un tel désir? Il est simplement indispensable de l’explorer dans toutes ses dimensions pour valider ou invalider qu’elles constituent un véritable projet pour vous et comment vous allez le déployer. Et lorsque l’exploration fait grandir votre motivation et votre détermination, alors vous tenez là un projet qui vient des tripes qui a davantage de chances d’aboutir. Voir aussi:

– Patrick s’apprêtait à passer les concours de la fonction publique, sans conviction mais cédant à la pression de prudence de son entourage. Il a finalement choisi d’écouter ses tripes et est aujourd’hui pilote de montgolfière.

– Abdel, devenu développeur par passion pour l’informatique et parce que c’était “un secteur porteur” en avait assez de coder toute la journée des applications dont l’objet l’intéressait peu. Il a finalement écouté son goût pour le contact humain, son envie d’aider les autres et d’être proche de sa communauté géographique. Il a monté une petite société qui fournit conseils, formation et maintenance informatique à des particuliers.

 

S’autoriser à renoncer

Encore une fois, cette phase exploratoire qui s’articule entre le quoi, le pourquoi et le comment d’un changement de métier n’est pas une prise de risque puisqu’elle consiste à étudier le projet et qu’en fonction des différentes informations que vous allez collecter autant sur vous-même que sur le métier, vous aurez la possibilité, à tout moment, de renoncer à un projet au profit d’un autre, voire d’une simple évolution de carrière ou de changements concrets dans la situation existante.

Et l’exploration qui mène à renoncer en connaissance de cause n’est jamais une perte de temps: c’est le seul moyen de n’avoir aucun regret et de passer sereinement à un autre projet. Ou inversement de ne pas passer à côté de votre job idéal. L’essentiel au final, est simplement de toujours avoir un plan B, moins fun probablement, mais qui permet de retomber sur ses pieds au cas où le projet se révèle ne pas être pour vous. Voir aussi:

 

 

* Je l’aime bien, celui-là;)

 

 

Voir aussi

Ithaque 1er influenceur français sur la reconversion professionnelle

Les obstacles à la reconversion professionnelle

Reconversion professionnelle et croyances limitantes

Reconversion professionnelle: l’être humain derrière le projet

Reconversion professionnelle: voyage au bout de l’enfer ou formidable aventure?

Une reconversion zen et dynamique à la fois!

7 conseils pour changer de métier

Déterminer s’il est temps de changer de métier

Transition de carrière: la réflexion n’est pas une prise de risque

 

Aller plus loin

Pour construire, entretenir et développer un état d’esprit à la fois dynamique et serein,  propice à la réussite de vos objectifs professionnels, pensez au coaching. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual au 01 39 54 77 32

 

 

8 Comments

  • reglahaut dit :

    Bonjour,
    Ce qui est assez bluffant, c’est que jamais personne ne parle d’une reconversion VERS l’informatique…L’informatique semble être quelque chose qu’on quitte. Moi ça m’intéresse de coder…N’y a-t-il pas un probleme de perception de certains métiers ?

    • Sylvaine Pascual dit :

      Merci de partager votre point de vue, car il soulève un point important: il n’y a pas de boulots qui ont du sens et d’autres qui n’en ont pas, chacun d’entre nous trouve de l’intérêt ou du sens dans un job… ou pas. Et c’est en effet une question de perception. J’ai pour ma part quitté l’enseignement avec beaucoup de joie, tant je m’ennuyais dans ce métier, et pourtant je vois régulièrement des gens qui deviennent prof après une tout autre carrière… avec beaucoup de joie.

      J’ignore si on quitte l’informatique plus qu’un autre métier. Suite à votre commentaire, je suis aller regarder un peu et je suis tombée sur cet article “Aimer l’informatique, c’est la quitter” qui date… de 2001, donc il semblerait que le problème de perception ne date pas d’hier.

      Mon cabinet est trop petit pour avoir une quelconque valeur statistique, cependant les informaticiens en désir de reconversion ne représentent pas le groupe le plus large des candidats au changement de métier. Il y a eu la vague des traders, aujourd’hui il y a beaucoup de commerciaux et j’ai même un client ingénieur de formation, qui a bifurqué vers d’autres fonctions et souhaite aujourd’hui revenir vers le développement. D’autre part, ayant dans mon entourage quelques informaticiens passionnés qui ne changeraient de métier pour rien au monde, je ne sais pas s’il y a effectivement hémorragie ou si c’est une simple question de perception. Le débat est ouvert!

      • Patricia dit :

        Bonjour,
        Etant analyste informatique depuis 10 ans, je peux vous donner mon point de vue.
        Selon moi, on trouve dans l’informatique beaucoup de personnes qui ont choisi un métier qui leur apporte la sécurité financière. ( je suis dans ce cas).
        Un choix de tête plutôt qu’un choix de coeur.
        Dans certaines structures, on est amené à coder, ou travailler comme des machines, et cela va crescendo, au détriment des relations humaines, et du respect de nos rythmes.
        Ce vers quoi on a vraiment envie de revenir.
        Patricia.

        • Sylvaine Pascual dit :

          Bonjour Patricia,
          En effet, quand au choix de métier se fait au bénéfice d’un besoin en négligeant les autres, cela finit souvent par nous rattraper et par se traduire en perte de sens et en stress. Le milieu informatique est en plus particulièrement exposé à la souffrance au travail et ça ne date pas d’hier, comme le motre cet article datant de… 2008.
          Merci pour ce témoignage!

  • Claude MAURIER dit :

    Oui une reconversion ou un nouveau départ risqué dans notre vie est une question de tripes ! La question est au départ : vais-je décider d’y aller ! Sauter le pas…Avec le recul d’une création d’activité indépendante en formation en 1995, après avoir eu peur, j’ai osé et maintenant je JUBILE ! Ce n’est pas simple mais d’autres challenges arrivent…. et pour avoir osé une fois je peux oser encore avec plus de discernement….Je me base sur mes CONVICTIONS INTIMES !

  • Ciao Patron dit :

    Pour moi c’est surtout pour éviter le bore-out au travail que j’ai décidé de prendre un tournant dans ma vie professionnelle. Et depuis que j’ai trouvé le job de mes rêves je n’ai plus eu cette peur de m’ennuyer au travail ! Une des meilleures décisions que j’ai faites.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *