Compétences relationnelles: présenter des excuses

 

 

Vous et moi sommes des gens forcément charmants et bourrés de qualités, qui traitons toujours nos contemporains avec une belle élégance. Nous ne ferions pas de mal à une mouche… Bon, il nous arrive tout de même parfois de heurter autrui, souvent sans intention de le faire. Apprenons à mettre notre petit orgueil de côté à  présenter des excuses simples, car c’est une véritable compétence relationnelle qui renforce les liens et la confiance mutuelle.

 

compétences relationnelles: présenter des excuses

 

Heurts, remords et pénitence: la valse des fausses bonnes idées

Nous pouvons tous, potentiellement commettre petites et grandes mauvaises actions à l’encontre de notre entourage personnel ou professionnel, bien entendu bien malgré nous, voire à l’insu de notre plein gré. Que celui qui n’a jamais rompu un engagement, ignoré une promesse, trahi une confiance ou tout simplement blessé quelqu’un par ses paroles ou ses agissements jette le premier caillou à nous autres mortels faillibles, contrits devant l’évidence: nos imperfections nous poussent parfois à agir dans le sens inverse du bénéfice de nos contemporains.

A Perpignan, on a une solution: une tradition et vieille de 600 ans, qui donne à l’expression “faire pénitence” une signification impressionnante, y compris à ceux qui, comme moi, ont autant de convictions religieuses qu’une certaine moule de mes amies, une fois qu’elle a fini dans la poêle. C’est la procession de la Sanch, où les pénitents masqués défilent, pieds nus, dans un silence de cathédrale. Cependant nos vies temporelles, quant à elles, nous offrent peu de possibilités d’expiation spectaculaire, de source d’absolution pour nos vilaines actions.

Parfois, ce sont des vétilles insignifiantes, suffisamment sans conséquence pour que tout le monde passe rapidement à autre chose. Du moins à nos propres yeux. Mais de temps en temps, lorsque nos agissements on heurté une valeur ou l’amour-propre de l’autre, les traces qui en restent peuvent ternir la relation et la confiance mutuelle. Et quand nous nous rendons compte du mal fait – ce qui n’est pas toujours le cas – nous en gardons un goût amer de regrets: cet attitude-là n’était pas sympa, pas cohérente avec l’image que nous avons de nous-même, pas le reflet de nos valeurs et nos principes moraux. Nous avons blessé quelqu’un malgré nous, et on ne se sent pas fiérot sur ce coup-là.

Face à nos regrets, nous pouvons tout à fait choisir le repentir spectaculaire et nous coiffer dignement d’une caperutxa pour aller porter le fardeau de notre péché un vendredi saint dans les ruelles de Perpignan. Cependant, on peut aussi choisir des options moins baroques mais efficaces tout de même.

Nous avons alors souvent recours à toute la série des fausses bonnes idées qui, autant dans la relation à soi que dans la relation à l’autre vont juste laisser pourrir la situation, avec toutes les conséquences que cela implique:

  • S’auto-flageller intérieurement, en mode dévalorisation, jusqu’à ce qu’aigreur s’en suive.
  • Se laisser subir le sentiment de honte, la culpabilité qui grignote lentement mais sûrement, entre autres l’estime de soi. Parce qu’on le mérite bien.
  • Remettre ses remords dans sa poche avec son mouchoir par-dessus, en espérant que ça passera, sachant très bien qu’ils repointeront le bout de leur nez quand bon leur semblera.
  • Se chercher de fausses bonnes excuses qui ne réussissent à convaincre personne. Sauf la partie offensée, de votre mauvaise foi.
  • Rejeter la faute sur autrui pour se dédouaner, preuve de malhonnêteté que la partie offensée n’omettra pas de noter sur ses tablettes, à côté du chien de la chienne qu’elle vous réserve.

 

Du bénéfice de présenter ses excuses

Nous pouvons aussi opter pour une alternative parfois difficile à mettre en oeuvre, car elle nécessite de passer outre ses petits orgueils mal placés: présenter ses excuses. Savoir demander pardon a l’immense bénéfice d’offrir de la reconnaissance à l’interlocuteur, de sortir de l’éventuelle tension latente ou du conflit, de soulager sa conscience, de renforcer ainsi la confiance en soi (être honnête et assumer ses responsabilités est une grande force), mais aussi l’estime de soi des deux parties, et par ricochet les liens relationnels et la confiance mutuelle.

En d’autres termes, faire acte de contrition ne nécessite pas forcément une mortification sur la place publique, un repentir théâtral: il suffit de reconnaître le tort causé de manière simple, honnête, directe. C’est une excellent moyen de mettre un terme aux émotions négatives de notre interlocuteur blessé, tout en répondant à ses besoins (voir Collaboration, conflit et lecture émotionnelle):

  • La partie offensée en colère se sentira entendue, reconnue dans les torts causés
  • La partie offensée angoissée se sentira rassurée et retrouvera ses marques
  • La partie offensée triste et découragée retrouvera le sens et la cohérence dont elle a besoin.

C’est pourtant un choix rare, en particulier dans le milieu professionnel, car comme beaucoup d’autres compétences relationnelles, quand le triangle de Karpman et le manque de savoir faire s’en mêlent (s’emmêlent?), on obtient vite le contraire de ce qu’on voudrait. L’idée de présenter des excuses est du coup souvent perçu comme un aveu de faiblesse, la certitude de perdre la face, la solution du loser. Alors qu’en réalité, c’est une preuve de force de caractère, de droiture, d’élégance relationnelle.

Voici donc quelques pistes sur la marche à suivre pour transformer des excuses en véritable compétence relationnelle, qui renforcera votre rayonnement, et votre affirmation de vous-même (un manager sachant réellement exprimer ses torts ou ses remords est souvent un sacré bonhomme ou une sacrée bonne femme). D’ailleurs, un travail de renforcement de l’estime de soi peut être nécessaire en amont pour être en capacité de reconnaître ses torts et l’exprimer.

 

Présenter ses excuses: les pièges à éviter

Quelques précautions s’imposent pour éviter de transformer cette compétence relationnelle en technique manipulatoire ou en comportement serpillière qui auront l’effet inverse, nourriront l’égo de l’un au détriment de l’autre, rogneront l’estime de soi des deux parties et alimenteront les jeux de pouvoir, en mode hérisson et paillasson.

  • Céder à la pression. On est alors complètement dans la relation de pouvoir et vous offrez un paillasson sur lequel la victime de vos agissements va pouvoir essuyer ses godasses offusquées. Il s’agit bien de rétablir une relation équilibrée, pas de vous offrir en pâture à une vengeance grande ou petite, qu’en plus vous aurez suscitée.
  • Les excuses pour avoir la paix, pour mettre fin à un désaccord etc. Elles doivent être sincères et n’avoir pour objectif qu’exprimer un regret. Tout autre intention serait manipulatoire et donc directement inscrite dans les jeux de pouvoir. Et à ce jeu-là, il y a toujours un perdant.
  • Les justifications, les interprétations et de façon générale toutes les expressions qui pourraient minimiser l’excuse présentée, où votre part de responsabilité dans l’agissement blessant. Votre interlocuteur ne sera pas dupe et s’arrêtera à ça.

devenir assertif au lieu de réagir en paillasson ou hérisson

 

Mini coaching: présenter des excuses élégante et dignes

Présenter des excuses peut être fait en s’appuyant sur la base de l’assertivité ou de la communication non violente, de façon à rester dans un échange d’égal à égal, qui prend en compte les deux parties. D’autre part, optez pour la simplicité, la concision, l’authenticité, ça vous évitera de vous égarer dans des dédales communicationnels aux vagues effluves de stratégie d’échec.

 

1- Les faits

Relatez les faits, les faits et rien que les faits. Supprimez toute interprétation qui pourrait nuire à la communication, toute justification qui pourrait minimiser votre responsabilité.

 

2- Les sentiments

Expliquez brièvement comment vous vous sentez vis à vis de votre comportement et pourquoi.

 

3- Les excuses

Présentez vos excuses en toute simplicité et de manière concise. “Je te présente mes excuses”, “je suis désolé”, mais évidemment, pas de “je m’excuse”, c’est à votre interlocuteur de le faire.

 

4- S’engager à prendre des mesures

Tout l’intérêt de vos excuses, c’est que le comportement qui a heurté autrui ne se reproduise pas. Proposez une solution concrète alant dans ce sens et tenez votre engagement!

5- Rentrer dans le dialogue

Un simple “qu’en penses-tu?” permettra de donner la parole à votre interlocuteur, et vous pourrez ensuite passer a dialogue pour régler l’affaire.

  • “Je t’ai remis le dossier Tartempion tardivement et tu as eu trop peu de temps pour préparer la présentation. Je suis ennuyé parce que je ne voulais pas te causer du stress supplémentaire. J’en suis désolé, et je te propose la prochaine fois de communiquer davantage sur mes impératifs pour qu’on puisse se mettre ensemble d’accord sur les dates butoir. Qu’en penses-tu?”
  • “Je t’ai interrompu brutalement à la réunion avec le client et j’en suis mal à l’aise, car c’était inapproprié. Je te présente mes excuses et je te propose, pour la réunion de la semaine prochaine, de prendre quelques minutes pour la préparer ensemble. Qu’en dis-tu?”

Et comme recevoir et accepter les excuses d’autrui demande un peu de doigté et de savoir-vivre, je vous donne rendez-vous prochainement pour la suite: accepter des excuses avec noblesse et magnanimité.

 

 

 

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4 Comments

  • Paul-Henri dit :

    Bonjour

    Merci pour ces conseils précieux. Pour ma part il me reste une interrogation. Il me semble que “présenter des excuses” et “demander pardon” (ou “accepter des excuses” et “donner le pardon”) ne sont pas la même chose. Le pardon serait plus “fort” que les excuses ?

    Bien cordialement

  • Le savoir vivre devient Compétences relationnelles

  • pcuenot dit :

    une compétence en voie de disparition

  • Edith dit :

    Bonjour,

     

    Merci Sylvaine.

    J’attends le second volet avec impatience.

    Quand j’étais petite, mes parents m’ont obligée à présenter des excuses à un de leur amis. Mais pas dans les moments où “l’offense” avait été faite, non. Entre le fait et les excuses il a bien dû s’écouler une à deux semaines. Des TAS de jours pendant lesquels cette perspective m’a rendue malade. A tel point que 30 ou 40 ans après, je peux encore ressentir mes sentiments, émotions d’alors.

    Est-ce pour cela que je n’ai plus jamais présenter d’excuses ? Enfin, jusqu’à il y a 18 mois.   Mais il m’aura fallu ET une psychothérapie ET la rencontre d’une personne pour qui reconnaître ses erreurs, ses faiblesses, être (modérément) fier de ses réussite, est une évidence mise en oeuvre avec une grande simplicité.

    On apprend par l’exemple aussi. Je me suis alors rendu compte qu’on pouvait reconnaître s’être tompé ou avoir été blessant, être désolé et le dire, sans se mettre en danger. Bien au contraire quand la sincérité est là, perceptible.

     

    Depuis, j’ai appris à le faire. Pas toujours. Pas avec tout le monde (il y a vraiment des personnes avec qui ça reste bloqué, je ne peux pas). N’empêche : c’est vrai que c’est souvent une véritable épreuve ; mais c’est également vrai que chaque fois ou presque, je me sens beaucoup mieux après, je sors “grandie”, je suis contente de moi ; et, chaque fois ou presque, les relations avec “l’autre” en sont renforcées, meilleures, plus confiantes, plus sincères. Bref, que des bénéfices. Mais, outch !ça reste dur dur…

     

    Quant à savoir accepter des excuses, là, j’avoue mon incompétence. Plus elles sont présentées avec sincérité, expriment un réel regret (pas une formule mécanique) plus je me sens gênée et ne sais pas comment réagir. Alors, vite, vite : la suite !

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