L’agilité expliquée à mon manager (2): un peu de pratique

quelques exemples de pratiques agiles au service du management

La théorie, c’est très bien, les mains dans le cambouis, c’est la suite logique sans laquelle il ne se passe rien. Aussi, après avoir vu les valeurs et principes de l’agilité, voici quelques exemples d’outils et de techniques que le management agile met au service d’une association performance/bien-vivre au travail qui nous transforment en grenouilles agiles et collaboratives…

 

quelques exemples de pratiques agiles au service du managementAgile ne rime pas avec facile!

Une mise en garde pour commencer, à l’attention des amateurs de baguette magique et solutions miracles en management: l’agilité n’a pas la prétention d’être LA réponse à nos petites et grandes douleurs managériales.

C’est avant tout un état d’esprit autour d’une dynamique d’expérimentation et d’adaptation pour favoriser la doublette performance/bien-vivre mentionnée plus haut. Si elle promeut la simplicité, il n’y a rien de simple ou de facile dans sa mise en oeuvre, d’où la nécessité de cette dynamique.

D’autre part, comme il s’agit essentiellement de rendre cette dynamique compréhensible, j’ai choisi de limiter le propos à quelques exemples clés qui me semblent éclairer la démarche, qualifiée d’agile parce qu’elle est à la fois plus souple et plus pragmatique que le management traditionnel. Juste une première approche, car les outils et méthodes sont très nombreux, en constant développement et vont chercher dans des domaines annexes et/ou connexes très variés parfois trèèèès techniques tels que:

Pour terminer, l’application de l’agilité passe par la formation, l’adaptation au contexte, l’appropriation d’une autre culture (voir Justification de l’intérêt des méthodes agiles de Claude Aubry). N’allez donc pas vous imaginer que je vous livre des clés suffisantes pour vous y mettre dès lundi, ce billet a un objectif purement informatif. Voilà donc quelques pistes en vrac;)

 

Agilité et management visuel: l’amour du post-it

Un truc qui frappe lorsqu’on pénètre dans les bureaux des équipes agiles, c’est qu’on y trouve des murs couverts de post-it, à croire qu’ils ont décidé de repenser la déco version débrouille, faute de budget. Et réalité, il s’agit de management visuel: les objectifs, les tâches, les avancements mais aussi les problèmes rencontrés et les blocages sont découpés et affichés. Ce tableau des tâches permet une vision à la fois globale et détaillée du projet.

Accessible en permanence, d’une lecture aisée, il sert à la fois de moyen de communication à consulter en fonction des besoins et de support de discussion. D’autre part, en rendant visible les contributions de chacun à l’effort collectif, il favorise la valorisation, la reconnaissance et renforce l’esprit d’équipe au travers du sentiment d’appartenance

 

Equipes auto-organisées et chef inversé

Voilà qui va coller les flubes aux petits chefs accrochés à leur pouvoir décisionnaire. Chez les agilistes, chacun sait ce qu’il a à faire et le fait dans un cadre collectif: le produit x, l’équipe x, la valeur pour le client.

Quid du rôle du chef dans tout cela? Réponse de Laurent Sarrazin: “« inversé !» Il passe plus de temps auprès de ses ouailles que derrière son bureau ou en réunion. C’est plutôt un coach, presque au sens coach sportif. Il aide à être auto-organisés, à garder le cap, et fait le lien avec le reste de l’entreprise. Ce chef est une perle : il a compris que l’équipe est hyper-motivée et l’aide à construire son autonomie, à trouver du sens, à coopérer, et la possibilité d’apprendre en produisant. Et ce n’est pas un monde de mous du genou : grâce à cette motivation, la performance est décuplée, ce qui ravit les étages supérieurs car plus de revenus sont générés ».

 

Equipes auto-organisées en mêlée

Donc, le boss ne prend pas en charge, il amène chacun à trouver les moyens de se prendre en charge, avec un rythme adapté au marathon que représente la conception/réalisation du produit ou de la mission.

Ici, l’agilité emprunte au rugby la notion de mêlée (scrum) qui est intéressante puisqu’en mêlée, l’essentiel est d’être lié aux autres joueurs pour pouvoir pousser dans l’axe ou éviter de tuer le jeu. En d’autres termes, c’est dans l’interaction et la compréhension mutuelles que se joue la performance. Un outil de management qui s’inspire directement des valeurs du rugby, vous pensez bien que ça me met de l’Algipan sur les agacements managériaux^^

La mêlée agile, SCRUM donc, est une réunion quotidienne d’un autre type. Elle se tient parfois debout pour éviter de se prolonger jusqu’à l’écoeurement, dans la salle ou se trouve le tableau des tâches et ses post-it, et suit un protocole simple et collaboratif: chaque membre de l’équipe explique:

  • Ses avancements depuis la veille
  • Ses tâches à effectuer
  • Les problèmes qu’il rencontre
Trois types de participants, tous partie prenante dans le projet:
  1. L’équipe:  savoir toutes les personnes qui réalisent la mission
  2. Le Scrum master n’est pas le chef de projet, il est responsable de l’application du principe Scrum.
  3. Le Product owner est le représentant des utilisateurs/clients, qui va exprimer les besoins ou exigences, puisqu’il est directement impliqué.
L’analogie rugbystique prend tout son sens quand on sait combien, dans ce sport, la conscience de son propre rôle au sein de collectif, autant que celle du rôle de chacun des autres membres, est importante.

 

Agilité du ciseau: les rois de la découpe

C’est bien connu: c’est plus facile de manger un boeuf quand on l’a débité en petits morceaux. C’est une question de bon sens: manipuler des gros morceaux, c’est peu aisé et ça rend pataud. En vertu de ce principe, les agilistes ont rendu leurs projets digestes, pour eux autant que pour le client, en livrant leurs produits par morceaux. Du coup, ils sont les louchebem du projet, les rois de la découpe: ils coupent, ils concassent, morcellent  à l’envi. Tout y passe:

  • Le temps de développement du produit, (souvent en parcelles de 2 à 4 semaines, considérées comme des “sprints”)
  • Les équipes, pour qu’elles restent des “tribus” gérables de 8 à 10 personnes maximum
  • Les tâches, découpées de façon lisible par tous et notées sur les post-it déjà mentionnés
  • Les solutions, qui sont livrées au client par petits paquets

 

Indispensable travail sur soi

L’une des spécificité du management agile, c’est qu’il a compris l’importance de la relation dans la performance collective et la collaboration. Il a en particulier compris qu’une telle posture ne se décrète pas, elle se construit et s’entretient.

Du coup, en ayant mis les doigts dans les mécanismes humains, les agilistes sont très friands d’apprendre les leurs. Un positionnement relationnel respectueux de soi comme de l’autre et qui favorise l’efficacité personnelle et collective est indispensable à une posture managériale solide. Teintée d’affirmation de soi, de sortie de l’égo, de capacité à gérer les égos des autres, d’empathie, cette posture est rarement innée et le travail sur soi est le seul biais par lequel elle peut se développer.

Aujourd’hui, cette posture difficile pour qui se trouve assis sur l’inconfortable fauteuil du manager, entre le marteau et l’enclume, amène de plus en plus à des situations de persécution ou pire, de harcèlement, car le manager qui ne dispose ni d’un cadre favorable ni des outils relationnels pour gérer son équipe a recours à toutes sortes de comportements un peu limite pour obtenir ce dont il a besoin.

D’autre part, le travail sur soi nécessaire demande recul sur soi et courage. Car il est beaucoup plus facile de céder à l’égo en jouant les paillassons ou les rouleau-compresseurs que de construire un relationnel sain, autour de l’estime de soi, de la gentillesse et de l’affirmation de soi.

Les agilistes l’ont bien compris, et se frottent à toutes les techniques qui peuvent les amener à mieux fonctionner avec eux-mêmes et avec les autres. Développement personnel, communication non violente, sociocratie, tribal leadership, process com, coaching et autres, ils se forment et travaillent sur eux-mêmes pour renforcer

  • les compétences relationnelles indispensables à la réussite du collectif
  • l’estime de soi nécessaire à la sortie des expressions de l’égo anti-collaboratif
Une vraie leçon pour tous les managers. A ce titre, je vous recommande la lecture de l’excellent blog de Véronique Messager Coacher une équipe agile qui présente des extraits de son livre éponyme, développant particulièrement le travail de posture du manager agile.

 

Agilité et changement en douceur

En conclusion, les agilistes sont à la fois des acrobates prêt à jongler avec diverses techniques pour améliorer leurs résultats, et les rugbymen de la vie professionnelle, avec un sens de l’engagement, de la contribution au collectif et un esprit d’équipe exemplaires.

Il se trouve que j’ai eu l’énorme plaisir de vivre un projet collaboratif agile, et je vous avoue qu’en parler c’est une chose, mais le vivre de l’intérieur, ça vous cloue le bec une fois pour toutes. Mais pas le clavier! Du coup je vous raconte dans un prochain billet le making of d’un livre collaboratif sur l’agilité, Rupture douce, co-rédigé par 18 auteurs (dont la bienheureuse moi-même) en mode agile.

 

Sources et ressources complémentaires

Management visuel et communication – François Gonnet
Le management visuel, une opportunité de s’améliorer – Le cercle les Echos
Explaining an Agile Coach to Mother
How we built our taskboard
Scrum : vite, bien et avec le client – Matthieu Vigan
Bien démarrer avec Scrum – L’agiliste
Management 3.0… Dans la peau du Manager Agile – Jean-Claude Grosjean
Les 6 postures du manager agile – Agiloa

 

 

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