Les compétences informelles au coeur de la formation des dirigeant(e)s de demain

Sylvaine Pascual – Publié dans Vie professionnelle / regards croisés

 

 

 

Après les 3 paradoxes des enjeux de société, et les 2 freins majeurs à l’évolution professionnelle, voici la troisième partie de notre retour sur le colloque Quels dirigeants, quelles dirigeantes pour demain?, organisé par le groupe Grandes écoles au féminin (GEF). Je vous propose de nous pencher sur les compétences indispensables au dirigeant idéal, et comment les développer.

 
Pour rappel, La 5ème étude menée par GEF en partenariat avec Sociovision Cofremca a questionné 21 dirigeant(e)s et entrepreneurs ainsi que 4200 diplômé(e)s de ses écoles autour de trois axes:

  • Les enjeux pour les dirigeant(e)s de demain
  • La vision de l’accès au pouvoir et de son exercice (qualités et compétences requises etc.)
  • Les propositions d’actions concrètes pour avancer positivement dans cette voie.

 

L’objectif étant de comprendre pour mieux agir. Voici les résultats de cette étude concernant le portrait du dirigeant d’entreprise idéal, vu par les diplômé(e)s de ces 10 grandes écoles (Centrale Paris, ENA, Ecole des Ponts PariTech, ESCP Europe, ESSEC, HEC, IEP Paris, INSEAD, Mines ParisTech et Polytechnique). Les résultats ayant déjà été repris par l’Entreprise, Les Echos et d’autres publications, je passe dessus rapidement pour m’attarder davantage sur les solutions.

 

 

 

Le dirigeant d’aujourd’hui: un portrait sans appel

 

Le portrait du (de la)dirigeant(e) d’aujourd’hui est sans appel. Si 68% des diplômés continuent à lui faire confiance , 50% doutent de sa capacité à gérer le long terme et à innover. Ce qui donne le sentiment qu’ils voient en leur dirigeants de vieux capitaines juste aptes à manœuvrer à vue leurs vieux navires pas trop loin du port. Pas question de s’essayer à rajeunir le rafiot où à voguer vers d’autres aventures. Ce qui est sans doute en corrélation avec leur propre manque d’envie de prendre des risques : la paille dans l’œil du capitaine serait-elle plus visible (regardable ?) que la poutre dans l’œil du matelot, tout quartier-maître soit-il ?

 

Car après tout, les diplômés des grande écoles sont, pour partie, les dirigeants de demain, et le portrait qu’ils dressent du dirigeant idéal est, en quelque sorte, une projection de l’idéal d’eux-mêmes. Du coup cette étude révèle peut-être un désir d’une refonte de l’intérieur d’un système qui les a formé et qu’ils n’ont pas envie de voir perpétrer.

 

 

 

Le dirigeant idéal: l’inverse du dirigeant d’aujourd’hui

 

Accusés d’avoir perdu le sens du réel, d’axer leur accession au pouvoir sur la cooptation et de perpétuer des systèmes toxiques, les dirigeants d’aujourd’hui catalysent sans doute toute l’exaspération face à un système qui s’enlise et a perdu son sens. Seuls 19% des diplômés leur reconnaissent leurs compétences comme tremplin vers le pouvoir, contre 76% qui estiment que leurs promotions sont leur fruit de leurs relations et de leur réseau.

 

 

 

Quant à leur profil dans l’exercice de leurs fonctions, il ne vaut guère mieux, puisqu’il s’agit essentiellement d’entretenir son réseau relationnel, de relayer les exigences des actionnaires et de savoir être dur. En revanche, très peu de diplômés leur reconnaissent un sens de l’innovation, l’exemplarité, la vision à long terme ou la capacité à manager, qualités qu’ils estiment pourtant incontournable dans la musette du parfait dirigeant d’entreprise. En d’autres termes, le (la dirigeant(e) idéal(e) est très précisément l’inverse de celui d’aujourd’hui.

 

 

 

 

Construire les dirigeant(e)s de demain

 

Les participants au colloque, et en particulier Éloïc Peyrache – Directeur délégué de l’école HEC et Myriam Maestroni – Présidente d’Économie d’Énergie SAS, ont beaucoup insisté sur la nécessité de développer les compétences informelles (ces soft skills parfois horriblement mal traduits par “compétences douces/molles” ce qui n’a aucun sens) mélange de compétences relationnelles et émotionnelles qui permettent d’inscrire son action professionnelle dans une dimension humaine indispensable au au renouvellement fonctionnel et opérationnel des entreprises et à un retour à des valeurs plus humanistes.

 

Et si les dirigeants sont dans la ligne de mire, c’est que ce renouvellement se fera sans doute dans un premier temps par le haut, dans la mesure où, s’il n’incarne pas l’esprit que l’entreprise promeut, alors l’incohérence du système ne risque pas de convaincre les salarié de l’appliquer.

 

Nous avions déjà eu l’occasion d’évoquer la nécessité de remettre les compétences informelles au pilotage de l’entreprise, et tous les indicateurs aujourd’hui montrent l’urgence de le faire. La question devient alors: comment?

 

Les diplômés ont quelques idées là-dessus, qui souhaitent davantage de critères moraux et éthiques dans la nomination et la rémunération des dirigeants, ainsi que des programmes de coaching destinés à leur faire travailler les compétences informelles en particulier.

 

 

 

Le manque d’intégrité et d’éthique naissent de la peur qui tend à compenser par l’intérêt personnel. Il va donc s’agir de former les dirigeants à satisfaire leurs propres besoins pour éviter qu’ils ne les comblent au travers du pouvoir, et soient ainsi en mesure d’être un individu au service du collectif qu’est l’entreprise, plutôt qu’un individu au service de son intérêt personnel. Cela passe par:

 

  • Une profonde connaissance de soi-même, de ses propres mécanismes émotionnels (qui vont bien au delà des promesses alléchantes mais superficielles de l’intelligence émotionnelle. Nous y reviendrons) pour avoir accès à ses besoins non comblés et savoir comment les satisfaire.
  • Un renforcement de l’estime de soi (par opposition à l’égo père de tous les vices) de façon à ce que les dirigeants soient en mesure de mettre en œuvre des alternatives aux comportements qui leurs sont reprochés (voir ci-dessous).
  • Le développement de véritables compétences relationnelles. Ce qui leur permettra de devenir des leaders charismatiques capables de fédérer et motiver, plutôt que des séducteurs

 

A l’évidence, les trois peuvent effectivement être travaillés en coaching, pour tous ceux qui sont déjà diplômés. Mais il serait certainement indispensable de généraliser dans les écoles des programmes de formation en management qui passent avant tout par un meilleur management de soi.

 

La bonne nouvelle, c’est que dans la plupart des cas, ce travail ne nécessite pas de d’exploration psychanalytique des histoires de vie qui ont mené à tel besoin à combler plutôt que tel autre et donc à tel comportement plutôt que tel autre. C’est au contraire un travail limité dans le temps et très concret d’évaluation du besoin et d’expérimentation de stratégies pour le satisfaire, ainsi que d’entraînement aux compétences relationnelles.

 

 

Voir aussi

 

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Comportements à réhabiliter en entreprise

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Aller plus loin

 

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