Travailler moins, travailler mieux!

Ralentir pour prendre le temps de travailler mieux... et gagner en efficacité

C’est la rentrée, résistez ! Résistez à la tentation des chapeaux de roues, à la croyance épuisante qu’être surbooké, c’est être important et intéressant, alors que c’est uniquement le moyen de finir surmené. Résistez à la surcharge mentale et  et expérimentez joyeusement le bénéfice du travailler moins, travailler mieux : le temps retrouvé.

Ralentir pour prendre le temps de travailler mieux... et gagner en efficacité

Prendre le temps de travailler mieux

Vous, je ne sais pas, mais moi, chaque année, la rentrée et sa frénésie me donnent surtout l’envie de ne pas me laisser emmener. Emmener dans les tourbillons du « stress de la rentrée », où l’on redémarre direct à fond, histoire d’être sûrs de réussir non pas sa rentrée, mais le claquage au bout de l’allée. Parce qu’à mettre les turbos à froid, on risque surtout de casser son moteur…

Et puis, pour tout vous dire, je n’ai pas envie de me retrouver à fond. Ni maintenant, ni dans un mois, ni au creux de l’hiver. Depuis longtemps et mis à part une parenthèse malencontreuse, j’ai un rythme décontracté et nourrissant qui me permet d’abattre beaucoup de boulot sans épuisement et sans y consacrer tout mon temps. Et  je n’ai aucune envie d’accélérer. Je suis bien, moi, en mode paisible. J’y trouve de l’inspiration, du plaisir et puis, 18 mois après la disparition de mon #BB (Mon inimitable, mon inénarrable Bourrin Basque), je me suis rendu compte combien le contact avec les chevaux me manquait, alors j’ai un nouveau camarade de jeux. Il est tout jeune, il est merveilleux avec sa crinière blonde de cheval de Barbie, et j’ai envie d’avoir du temps pour lui.

Prendre le temps de travailler mieux

Alors j’ai eu envie de parler de ralentir au travail, de décélérer, de refuser de se retrouver – paradoxe – coincés, pieds et poings liés dans l’agitation vaine, aliénante, épuisante qui est de bon ton pour donner l’image d’un vrai professionnel qui mérite son salaire.  J’entends évidemment le faire à ma manière, donc garanti sans obligation de gagner du temps en rognant sur tout, ou pire, à coups de loi de ceci ou cela. Pareto et consorts ont sans doute fait des choses formidables, mais les lois et commandements, ça me chagrine la matière grise:

  • C’est l’antidote à l’organisation aux petits oignons qui est par nature optimale quand elle est personnelle et adaptée à soi-même.
  • C’est un bon moyen de renforcer le stress et la pression (surtout quand ça ne marche pas) de l’obligation auto-imposée en mode discipline martiale et obligation de résultat.
  • C’est enthousiasmant comme la blanquette de veau de Tante Adèle, par un dimanche de novembre, quand elle a eu l’idée aussi sotte que grenue (comme disait Béru) d’inviter son fils qui a remporté la médaille d’argent des Championnats du monde de Beaufitude à Cambrousse-sur-Trou.

J’associe ralentir au travail au temps de la beauté du geste, au plaisir du travail bien fait, ainsi qu’à l’efficacité qui découle de la décontraction.  Parce qu’on sous-estime beaucoup trop que travailler moins, c’est travailler mieux. Et moins je bosse, mieux ça se passe car mieux je bosse… donc moins j’ai besoin de bosser. CQFD! Le but de travailler moins, c’est de renouer avec le temps. Le temps pour soi, le temps passé à faire autre chose que bosser, car il y a une vie après le boulot.

Il s’agit donc pour moi de vous proposer de réfléchir à votre relation au travail, à votre rapport au temps et, pour ceux qui seraient enthousiasmés à l’idée, de réfléchir aux moyens dont ils disposent pour travailler moins, travailler mieux.

Parce que lété on est plus décontractés et on a plus le temps d'expérimenter

 

Travailler plus, travailler vite, travailler trop, travailler mal, vivre mal!

De façon générale et contrairement aux idées reçues un poil réac sur les 35 heures, nous travaillons de plus en plus, en particulier en raison des limites de plus en plus poreuses entre vie personnelle et vie professionnelle. La technologie, les nouvelles formes de travail (et en particulier le télétravail) nous poussent à bosser davantage, à bosser partout, tout le temps et nous avons même collectivement renoncé à la déconnexion totale pendant nos congés. Et travailler plus, c’est le plus souvent travailler trop et les résultats ne sont pas jojo : l’excès de zèle est mauvais pour la cafetière, la santé et la carrière:

 – Baisse du niveau de forme
 – Baisse de productivité
 – Dégradation de la santé (augmentation des risques cardio-vasculaires, de la consommation d’alcool, de tabac, insomnie etc.)

– Travailler plus mène à la fatigue, l’anxiété, le stress, ce qui amoindrit la qualité du travail et par ricochet les possibilités d’évolution.
– La production résultant de 70 heures de travail hebdomadaire excède à peine celle fournie en 56 heures. Voilà qui est fascinant : 14h de travail en plus pour quasiment rien. C’est con : 14h de sommeil en plus et le cerveau reposé aurait gagné en efficacité !

Toujours selon cette étude,  les salariés qui ont davantage de liberté dans l’organisation de leur travail, en termes d’horaires et de méthode, sont moins stressés, plus satisfaits professionnellement et davantage impliqués. Voilà qui va dans le sens d’une organisation personnalisée telle que nous en avions parlé ici:

 

Pourtant il reste de bon ton de « ne pas être du genre à compter ses heures », même si l’on est plus efficace en emmenant nos neurones s’aérer régulièrement. Car honte au malheureux qui s’aventurerait dans cette contrée singulière où le mépris côtoie le préjugé et où l’on finit inévitablement par recevoir l’insulte suprême, le point Godwin de la vie professionnelle : la comparaison avec les fonctionnaires. Monumentale absurdité qui promeut un présentéisme vide, une implication de façade et une productivité douteuse. puisque « les salariés abonnés aux heures supplémentaires étaient plus enclins à commettre des erreurs que leurs homologues qui n’en font pas. Ce sont aussi ces personnes-là qui souffriraient le plus d’états d’anxiété, de fatigue, voire dans certains cas, de burn-out. »

Faire ses heures, ce n’est donc pas être un indolent branleur, limite feignasse et bon à rien, ça peut au contraire signifier se préserver et donner par ricochet à l’entreprise – cette organisation merveilleuse qui nous permet si aimablement de gagner notre croûte – son attention la plus qualitative, sa productivité la plus productive! Bon, disons-le sans ambages, c’est surtout le moyen le plus sûr de préserver sa santé mentale et physique, ce qui n’a pas de prix.

Mais voilà : lever le pied, c’est dur. C’est dur parce que les croyances ont la vie dure et parce que nous craignons le regard des autres, surtout quand on nous abreuve des clichés du monde du travail. Alors que c’est un acte de résistance.

l'art de l'injoignabilité heureuse

 

Ralentir : un acte de résistance

Si l’on voit moins de publications navrantes qui conseillent de préparer sa rentrée professionnelle pendant ses vacances et davantage d’articles qui encouragent une reprise « en douceur », le but reste souvent de « monter en puissance », même doucement, pour retrouver sa « vitesse de croisière ». Montée en nuisance, oui ! Car à l’arrivée, s’il s’agit de mettre deux jours de plus pour se retrouver le nez dans le guidon, homo rapidus pédalant à toute vapeur sur les pentes glissantes du déni de soi (de ses besoins, de ses envies, de ses aspirations), du surmenage, de la perte de sens et du dégoût.

Tout cela n’est pas exactement constitutif de plaisir au travail et de plaisir tout court, ni même générateur d’efficacité. C’est une anthologie des façons de se pourrir la rentrée, histoire d’être parfaitement certains que vous serez sur les rotules à la troisième semaine de septembre.

10 trucs infaillibles pour se pourrir la rentrée

Et si on profitait de cette rentrée pour ralentir professionnellement, en mode Gaston sans doute, en acte de résistance contre la pression de performance, la pression de résultat, la pression du travailler vite, la pression d’être un bon petit soldat, un modèle d’implication…  pour enfin travailler mieux. Car on peut très bien manifester un envie de gagner en efficacité:

– Pour le plaisir: une efficacité qui ne soit pas que curative des maux de boulot (bref: ne plus être dé-bor-dé, gérer son stress etc.)

– Pour le plaisir (2) : une efficacité qui n’entre pas uniquement dans une logique de performance destinée à vous transformer en super-héros de boulot ou de créativité.

Gagner en efficacité ne signifie pas nécessairement pouvoir faire plus, être « meilleur » ou avoir accès rapidement et sans conditions aux veaux, vaches et cochons des promotions et participer à la course effrénée et un poil hystérique de la performance à tout prix, qui reste étonnamment ancrée dans une vision très linéaire de la carrière, dans l’objectif qu’elle a de démontrer des choses à son environnement professionnel. Je parle de l’efficacité relax qui permet de gagner en plaisir de faire (à sa manière) et de gagner du temps pour des choses importantes et agréables. Y compris la rêverie et la glandouille car n’oublions pas que peigner la girafe et savourer des instants contemplatifs peut être important et agréable – et augmenter l’efficacité, incidemment.

rêvasser à des vertus insoupçonnées qui méritent d'être redécouvertes

D’autre part, ralentir et prendre le temps de travailler mieux ne signifie pas se traîner en mode tortue pendant l’intégralité de sa vie professionnelle. Ca n’exclue pas la possibilité de mettre un coup de collier par moment, quand ça s’avère nécessaire. Bien au contraire, puisque c’est une façon de se préserver, ça revient à vivre va vie professionnelle en mode guépard relax qu’en escargot mollasson ou en colibri frénétique. Un art de travailler qui permet d’en garder sous le capot au cas où.

Enfin, plutôt que de chercher à se lever plus tôt, se coucher plus tard,  « optimiser » au maximum en se faisant livrer repas tout prêt, pressing et litière du chat, en collant les gosses devant des écrans et en confiant à des applications les arcanes de notre organisation. La robotisation de nos vies personnelles menace notre santé mentale et nos relations.

 

 

Travailler moins travailler mieux… vivre mieux

Ralentir au travail commence à susciter de l’intérêt et l’on entend davantage parler de slowslow life, slow food, slow working, slow management. Prendre le temps devient un nouvel art de vivre et de travailler qui vaut aussi pour ce qu’il préserve l’humain. La réduction du temps de travail apparaît de plus en plus comme un solution digne de considération et un objet d’expérimentations qui, si elles ne font pas l’unanimité dans un monde où seule la rentabilité financière fait loi, ont le mérite d’en montrer les bénéfices humains… et les gains de productivité:

En attendant que nos entreprises se penchent sérieusement sur la question, et que ces initiatives se généralisent, nous avons des pistes à explorer pour nous mettre au job crafting de nos pratiques professionnelles et modifier, dans une certaine mesure, notre façon de travailler. Et en préambule, je vous propose de commencer par explorer votre rapport au temps:

Sur une échelle de 1 à 10, quel est votre degré de satisfaction quant au temps que vous consacrez à votre boulot?
Quel relation entretenez-vous au temps de travail ? Comment le concevez-vous, comment le déterminez-vous?
Comment gérez-vous votre temps de travail?
Dans quelle mesure avez-vous le sentiment d’être débordé(e), surmené(e), de travailler trop?
Qu’est-ce qui vous empêche de ralentir au travail, de travailler moins ?
Que craignez-vous exactement ?
Imaginez que vous consacrez une heure de moins par jour à votre travail.
Quels sont les bénéfices ?
Qu’est-ce qui change, qu’est-ce qui devient possible (au travail si vous êtes tenu à des horaires, de façon générale, si vous êtes aux commandes de votre emploi du temps)

 

Vous pouvez commencer par là

L’art de l’injoignabilité heureuse (1): 10 bonnes raisons de s’y mettre
Procrastination, performance et sérendipité
Ralentir: les vertus de la lenteur
Libérer l’efficacité professionnelle et la créativité en 7 points
Burnout : 3 conseils pour rebondir avant l’effondrement

 

Aller plus loin

Vous voulez vous mettre au job crafting et expérimenter diverses façons de travailler moins, travailler mieux pour gagner en plaisir de travailler? Ithaque vous accompagne. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual.

 

 

 

2 Comments

  • Karine dit :

    Merci Sylvaine pour cet acte de résistance et cette page complète et inspirante pour réveiller, ou pas d’ailleurs, le Gaston en chacun de nous 😉
    Le slow, c’est la vie, mais qu’il est difficile de s’y laisser aller quand tout s’agite et se “notifie” autour de nous.
    Je profite de ce passage pour saluer ta verve toujours au service d’un fond percutant.
    Belle et tranquille rentrée !
    Karine

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