Petit manuel de savoir-vivre entre valides et handicapés (2): 10 trucs pour favoriser la relation

Eviter le malaise dans les relations entre handicapés et valides

Les relations humaines et professionnelles sont déjà assez compliquées comme ça, inutile de laisser une simple caractéristique comme le handicap leur donner une tournure encore plus délicate. En deuxième étape de notre exploration du savoir-vivre entre valides et handicapés, voici donc 2 fois 5 trucs simples pour facilité les relations entre les uns et les autres (1)

Eviter le malaise dans les relations entre handicapés et valides

 

Un intérêt de plus en plus marqué pour la facilitation des relations entre valides et handicapés

Le baromètre 2011 des salariés français face au handicap révèle que dans l’ensemble, les relations entre personnes seraient en train de s’améliorer. Je dis bien seraient, parce que je reste dubitative quant à l’objectivité des réponses, tant les relations professionnelles entre valides et handicapés restent teintées par les incompréhensions mutuelles.

Cependant, ce qu’il y a de très encourageant à la fois dans cette enquête et dans les multiples réactions que j’ai pu avoir sur le premier billet  Petit manuel de savoir-vivre au travail entre personnes valides et handicapées, c’est l’énorme intérêt pour le sujet, et une volonté réjouissante, de la part des valides, de comprendre comment s’y prendre. Il s’agit de moins en moins d’éviter la confrontation au handicap que d’apprendre à éviter les maladresses et à dépasser le malaise potentiel.

Une véritable bonne nouvelle qui pourrait avoir, petit à petit, des répercussions précieuses sur les freins à l’embauche de salariés handicapés, leur intégration dans l’entreprise, mais aussi, tout simplement, dans la vie sociale.

 

Savoir-vivre à double sens

En préambule, soyons clairs: nous ne sommes pas là pour mettre les gentils handicapés d’un côté et les crétins valides de l’autre (même si parfois, la tentation…). Au bal des mauvaises relations, tout le monde danse la polka et nous avons tous notre part de responsabilité dans nos incompréhensions mutuelles et nos relations pourries, d’où l’idée que ce manuel s’adresse autant aux uns qu’aux autres, pour favoriser la compréhension mutuelle.

Laissez-moi vous donner un exemple. L’autre jour, je discute cinéma avec un ami et voilà que je lui dis que tel film qu’il m’avait conseillé m’a renvoyé des émotions. Des émotions d’handicapée (2). Silence de mort, silence gêné. J’y suis allée à la brutale et j’ai déclenché un sentiment de culpabilité qui aurait pu mettre un terme à la conversation. Il est évidemment plus utile d’apprivoiser l’autre en douceur que de lui balancer un tombereau de sa propre réalité sur les genoux sans crier gare. Lui péter les ménisques, ça ne fait pas avancer le schmilblick et ça ne va pas lui donner envie de revenir papoter avec moi;)

Voici donc 5 trucs à l’attention des valides et 5 trucs à l’attention des handicapés pour mieux vivre et mieux travailler ensemble. Ce petit manuel n’est évidemment pas exhaustif, et si vous avez des anecdotes, des témoignages ou des exemples, ils sont les bienvenus en commentaires, car ils peuvent nous être utiles à tous.

 

5 trucs pour les valides

Les personnes handicapées ont tout entendu sur le handicap en général, sur le leur en particulier. Elles ont été confrontées à tant d’idées reçues, de braves tentatives de gentillesse qui se soldent par des fails pénibles, d’interprétations abusives, de jugements hâtifs, qu’elles peuvent parfois être usées d’entendre les mêmes refrains. Offrons-leur donc une alternative…

 

1- Etre naturel

Le handicap est une caractéristique comme une autre, alors détendez-vous et agissez comme avec n’importe qui d’autre. Il y a relativement peu de chances pour que vous fassiez des bourdes irréparables si vous êtes naturel. Epargnez-vous et épargnez à votre interlocuteur la fausse empathie qui consiste à mettre vos réactions à la place des siennes, du genre “Moi, à ta place, j’aurais du mal à supporter” ou encore “oh la la, ça doit être dur”. Contentez-vous d’écouter leurs réactions, ce qui vous permettra d’apprendre à connaître la personne au delà du handicap.

Une manager me racontait récemment que, lorsqu’elle a accueillie une personne en fauteuil dans son équipe, elle était tellement mal à l’aise que suite à une conversation, elle s’en était beaucoup voulu parce qu’elle avait dit à sa collaboratrice “on verra en avançant sur le sujet”. Relax les amis, utiliser une simple expression n’est pas un épouvantable manque de considération;)

 

 2- Arrêter de s’écouter

Oui, le handicap renvoie des émotions et des craintes. Ce n’est pas une raison pour en faire porter le poids à votre collègue handicapé, par exemple en l’évitant ou en lui renvoyant une pitié très charité chrétienne mais assez pénible.  son lot est déjà plus lourd que le vôtre, évitez-lui a double peine. Vos émotions et vos craintes vous appartiennent, à vous de les gérer, par exemple en appliquant le point 3.

 

3- Poser des questions pour comprendre

La principale source de malaise entre valides et handicapés, c’est que les premiers ne savent pas ce que vivent les seconds et se font tout un tas d’idées parfois très éloignées de la réalité sur leur quotidien. Leurs propres peurs d’être incapables de faire avec, s’ils se retrouvaient dans la même situation, entrave une relation saine. Du coup, autant poser toutes les questions que vous vous posez. Dans l’ensemble, les handicapés préféreront ceux qui s’intéressent à leur expérience réelle du quotidien à ceux qui préfèrent s’écouter eux-mêmes.

  • Demandez à la personne handicapée si elle est d’accord pour répondre à vos questions sur sa situation
  • Posez vos questions de façon claire, simple et directe, sans vous prendre la tête sur d’éventuelles maladresses: vous avez ouvert le dialogue et c’est surtout ça qui compte.

4- Ne pas trop en faire

Etre prêt à filer un coup de main à un collègue qui en a besoin, c’est toujours bien, c’est prosocial et ça entretien les liens. En revanche, anticiper ses besoins ou les exagérer parce qu’il a un handicap, c’est tomber dans un comportement Sauveur pénible et infantilisant qui a le don de générer l’inverse de l’effet recherché. Le résultat pour la personne handicapée que vous vous serez acharné à aider malgré elle sera sans doute plus d’agacement, de frustration et d’envie de vous éviter.

Ue envie excessive d’aider parle surtout de votre propre malaise et de vos propres besoins à combler. Voir: 

triplette élégance relationnelle

5- Observer

Un bon moyen de minimiser l’émotion suscitée par le handicap consiste à focaliser sur la façon dont la personne s’y prend pour effectuer ses tâches malgré, et surtout avec cette caractéristique spécifique qui teinte son quotidien différemment du vôtre. Cela permet d’apprivoiser la différence plutôt que de la craindre, en prenant conscience qu’il est possible de compenser, que ça n’est pas forcément coûteux ou insurmontable et que, quoi qu’il en soit, le collègue handicapé développe des trésors d’inventivité pour compenser.

Et pour vous en convaincre:

 

5 trucs pour les handicapés

La récurrence des idées préconçues auxquelles les handicapés sont confrontés est bien fatigante et peut générer méfiance, besoin de se protéger et découragement. Voire même un poil d’agressivité dans certains cas. Mais rappelons-nous que la maladresse, si épuisante soit-elle, n’est pas un crime et attachons-nous à les accueillir, ces valides qui ne comprennent rien…

 

1- Eviter le repli sur soi

Mieux vaut aussi éviter la tentation du repli sur soi, refuge apparent qui préserve de ces réflexions et attitudes pénibles, car il renforce le sentiment de différence entre les uns et les autres. Sortir de sa caverne ou de son cocon demande un effort. Rappelez-vous que surmonter la crainte du handicap pour venir vers vous demande aussi un effort aux valides. Autant donc se rencontrer à mi-chemin.

 

2- Faire preuve de bienveillance

Les gaffes bévues et boulettes des valides vis à vis des handicapés, si mal-plaisants qu’ils soient, sont souvent le fruit fâcheux de leurs bonnes intentions. Ça n’est peut-être pas une excuse, mais c’est certainement une raison suffisante pour prendre du recul  face à des réflexions que le valide s’adresse au fond à lui-même. Et faire preuve de bienveillance. Moins s’agacer des réflexions maladroites est surtout une économie d’énergie, et cette énergie, vous en avez besoin pour des choses plus intéressantes et constructives;)

 

2- Expliquer et dédramatiser

Accueillir les questions et y répondre de façon factuelle: c’est à dire sans cacher les difficultés, mais aussi sans tomber dans des dramatisations qui risquent d’augmenter le malaise. Le collègue a besoin de comprendre votre situation, cependant il n’est pas la meilleure personne à qui exposer son propre mal-être.

 

3- Soyez clairs sur vos besoins

N’hésitez pas à partager ce qui vous pose problème, les points sur lesquels une aide ou tout simplement une adaptation peut vous être utile. Il est probablement impossible pour une personne sans problème d’audition de comprendre par lui-même les difficultés que peut représenter, par exemple, le brouhaha d’un restaurant d’entreprise pour un malentendant. Etre clair sur vos besoins spécifiques lié au handicap vous permettra tout simplement d’obtenir ce dont vous avez besoin, d’une part, et d’autre part de montrer à certains collègues qui pourraient craindre une surcharge de travail que leur peur est infondée.

N’hésitez d’ailleurs pas à faire des demandes: la bienveillance d’autrui et le plaisir à rendre service est le plus souvent largement sous-estimé.

savoir demander de l'aide est une compétence relationnelle révélatrice de courage et de force de caractère

 

4- Développer l’assertivité

Lorsqu’un collègue valide a un comportement fatigant, lié à votre handicap, qui dure un peu, mieux vaut lui exprimer ce qui vous dérange rapidement, pour éviter que le malaise et la rancoeur s’installent, jusqu’au pourrissement de la relation. L’assertivité et la communication non violente permettent de se faire entendre sans bousculer l’autre et de poser un mode relationnel satisfaisant pour tout le monde. Elles nécessitent un peu d’entraînement, car il est assez facile de se planter, alors autant vous y mettre;) Voir:

la communication non violente pour recadrer un comportement pénible

 

5- Rire

Nous l’avions évoqué en parlant de la BD Y’a pas de malaise: rire de nos incompréhensions mutuelles ou de nos maladresses peut aussi être un excellent moyen de dédramatiser le rapport au handicap. Il revient certainement au handicapé d’en prendre l’initiative, car l’inverse pourrait être mal perçu. N’hésitez pas à faire preuve d’un humour bienveillant, il sera une aide précieuse dans vos relations.

relations professionnelles handicapés valides y'a pas de malaise

Et pour décontracter ces valides mal à l’aise et culpabilisés qui pensent que la vie d’handicapé, montrez-leur que la vie d’un handicapé, si elle n’est pas simple, ce n’est pas non plus que misère et sinistrose: elle est aussi joie de vivre, débrouillardise et collaboration, montrez-leur cette magnifique vidéo, réalisée par Chanel 4 comme trailer des Paralympiques 2016. Une pure merveille.

 

(1) Etant moi-même « en situation de handicap », comme on dit, et n’étant gênée ni par le terme valide, ni par le terme handicapé, j’ai choisi de les utiliser pour nous épargner les périphrases d’usage qui compliquent la lecture. J’espère que ce choix sera compris comme complètement dénué de jugement sur les uns ou les autres et ne suscitera pas d’incompréhension inutile;)

(2) voir Vie professionnelle: deux ou trois idées… paralympiques!

 

Voir aussi

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Wifi neuronal et compétences relationnelles
Relations humaines et morale primate: faisons les singes!
L’égo, frein majeur à l’intelligence collaborative
Dossier: compétences relationnelles
Dossier: mieux communiquer

 

 Aller plus loin

Vous voulez construire des relations professionnelles saines, sereines et réjouissantes? Pensez au coaching. Pour tous renseignements, contactez Sylvaine Pascual

 

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