Emotions et culpabilisation

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Sylvaine Pascual – Publié dans Comprendre les émotions

 

La conviction que nous sommes capables de déclencher toutes sortes d’émotions chez les autres est non seulement fausse, mais aussi la porte ouverte, entre culpabilisation et chantage affectif, à tout un tas de ratés dans nos relations.

 

 

emotions cupabilisation 

Culpabilisation par l’émotion

 

L’autre jour, un client – appelons-le Christophe – m’explique que l’un des freins à sa  reconversion, c’est qu’il ne veut pas être un fardeau supplémentaire pour son père, qui déjà bien des sources d’inquiétude. D’ailleurs, le paternel bienveillant n’oublie pas de le lui rappeler régulièrement, avec des réflexions du genre “avec toutes les inquiétudes que tu m’as déjà causées [un accident qui a immobilisé Christophe quelques mois], tu ne vas quand même pas m’infliger celle-là en plus”.

 

Il n’en faut pas plus pour que le plus indifférent d’entre nous culpabilise, à l’idée de coller angoisses et insomnies superfules à un géniteur forcément plein d’amour, puisqu’il s’inquiète. Il y a dans ce type de convictions tellement d’idées fausses que je ne sais pas par où commencer.

 

 

Faux et usage de faux

 

Ces convictions fausses nous amènent à agir sur des bases fausses, avec des conséquences pénibles pour la relation, que nous soyons l’instigateur de la culpabilisation ou celui qui la subit. Alors pour éviter l’inculpation pour faux et usage de faux, voyons voir comment ça fonctionne.

 

Tout d’abord, nous sommes incapables de générer  une émotion chez l’autre, c’est biologiquement impossible, chacun génère ses propres émotions tout seul comme un grand. Les émotions et sentiments que nous éprouvons vis à vis d’une situation sont le fruit de la perception que nous en avons, pas de la situation en elle-même. Nos émotions sont déclenchées par nos propres besoins dans le but de les signaler pour les combler. Ceci signifie 2 choses dans notre exemple:

 

1) Christophe ne peut donc pas déclencher l’inquiétude de son père, c’est ce dernier qui, en fonction de ses besoins mal comblés, va réagir ainsi. Un autre parent pourrait réagir avec enthousiasme, avec indifférence, avec mépris, avec tristesse, en étant encourageant ou de quantités d’autres manières.

 

2) Ce n’est pas l’amour qui s’exprime lorsque nous nous inquiétons pour quelqu’un d’autre, c’est notre propre malaise face à aux difficultés que l’autre pourrait rencontrer. En d’autres termes, le message, c’est « je suis confronté à une situation que moi j’ai du mal à vivre ». En bref, c’est bien l’intérêt personnel, pas l’amour qui parle (si nous arrêtions d’idéaliser l’amour, nous le vivrions sans doute mieux)

 

Un autre exemple ? L’ultra classique “il m’énerve”, qui est une affirmation fausse: “je m’énerve quand il fait ci ou ça parce que ça me renvoie …(ajouter votre expérience malheureuse)” serait plus juste. Et votre énervement est le reflet de vos propres besoins, pas d’autre chose et surtout pas du comportement imbuvable du malotru: d’autres le supprotent très bien.

Nous en avons parlé à plusieurs reprises: nos émotions ne nous parlent que de nous. Elles sont les indicateurs d’un besoin à combler à l’intérieur de nous, pas d’un manquement chez les autres.

 

 

Chantage affectif et culpabilisation

 

Un problème majeur de cette conviction erronée que nous pouvons générer les émotions des autres, c’est laculpabilisation et la manipulation. Inconsciemment, le père de Christophe utilise le chantage affectif pour manipuler son fils et l’amener à agir selon ses désirs.  Et Christophe y cède à cause de la même croyance. Déni de soi, frustration et ressentiment ne sont pas loin.

 

 

Emotions et responsabilité

 

Cela ne nous déresponsabilise pas non plus et ne justifie pas le fait de faire ce que nous voulons quand nous le voulons, sans nous préoccuper des sentiments des autres, et en particulier de nos proches. Cela reviendrait à devenir illico presto un mini Dark Vador, Pape des persécuteurs, et ça, ça n’est pas une bonne idée : d’abord il finit mal, et puis ses relations familiales sont un brin chaotiques.

Dans le cas de Christophe, il est évident qu’une conversation avec son père s’impose, pour que chacun puisse s’exprimer réellement, prendre en compte le point de vue de l’autre et trouver le modus vivendi qui rendra les interactions sur la question de la reconversion acceptables.

 

 

Mini coaching sortir de la culpabilisation et du chantage affectif

 

Personne n’est à l’abri de la tentation manipulatoire culpabilisante. De la subir comme de l’infliger. Depuis le très anodin « allez, pour me faire plaisir »  jusqu’à la menace, en passant par toute la gamme des « tu sais que je n’aime pas me mettre en colère alors arête » et autres « tu dis ça pour me faire de la peine ». Il serait sans doute plus sain de nous pencher alors sur ce que nous voulons vraiment et de l’exprimer clairement, tout en acceptant la possibilité que l’interlocuteur n’accède pas à nos désirs.

 

– A chacun d’entre nous d’identifier nos propres besoins face aux émotions qui surgissent en nous dans la relation à l’autre.

Les besoins à combler

Remparts, coursives et échauguettes: les états de défense aux émotions

– A chacun d’entre nous de définir et d’affirmer nos limites pour ne pas avoir à subir des comportements que nous considérons comme insupportables.

Définir ses limites

Compétences relationnelles: établir ses limites

– A chacun d’entre nous de déterminer ce que nous voulons vraiment, plutôt que d’avoir recours à l’émotion pour culpabiliser une autre personne, et de lui faire une vraie demande assertive.

Les ratés de la communication: non demandes et petites manipulations

Mieux communiquer: les demandes assertives

– A chacun d’entre nous d’accepter que l’autre est libre de ces choix et que si ceux-ci nous gênent, mieux vaut en parler que de tenter une manœuvre manipulatoire.

Nos émotions nous parlent de nous

– A chacun d’entre nous de mesurer les conséquences réelles de nos actes sur les autres, et de les prendre en compte dans nos décisions

Solutions efficaces vs solutions adéquates et éthiques

 

 

Et vous, vous arrive-t-il de subir la culpabilisation émotionnelle d’autres personnes ?

De l’infliger ?

Que se passe-t-il si vous acceptez la responsabilité qu’à chacun de ses propres émotions ?

Quel regard portez-vous alors sur vous-même ? Sur les autres ?

 

 

Voir aussi

 

Les émotions: amies fidèles ou ennemies incapacitantes?

Besoins affectifs: bien-être et dépendances

Prise de décision: se méfier des amis qui nous veulent du bien

 

Les dossiers d’Ithaque: Comprendre les émotions

 

 

Aller plus loin

 

Pour apprivoiser vos émotions et en faire les aliées de votre bien-être, contactez Sylvaine Pascual au 01 39 54 77 32

 

 

 

 

 

9 Comments

  • christesre dit :

    Bonjour

    Cela fait quelques temp que j’ai decouvert votre blog, ce sujet particulier,me donne envie de commenter.

    Oui j’ai subi de la culpabilisation personnelle infligé par … Mon Pere. Qui comme l’exemple que vou citez n’a jamais ete content de ce que je faisait sous pretexte du pas capable, du mauvais choix, etc. La difficulté relationnel que cela a engendré c’est que au final je n’etaits pas moi meme, et comme cela a commencé tout petit vous pensez bien que lorsque j’ai commencé a la contredire, meme sans le faire expres ne serait ce que par mon comportement ou ma tenue vestimentaire, cela a tourné vite a la dispute, a cela vous ajoutez de l’alcoolisme je vous laisse imaginer les fins de repas. Mais mon profont carractere ma permis de reagir a un certain age, et pour eviter d’en venir au dispute j’ai fais le choix de me taire et surtout de ne pas le frequenter, de faire mes choix sans son avis.

    Ce qui m’a permis d’etre qui je suis aujourd’hui.

    Alors pour en venir au choix du dialogue, dans certain cas cela n’est pas possible.

    J’ai trouvé mon bouclier et avance dans la vie sans l’assurance de mon paternel, ce qui manque il faut le dire (aujourd’hui a mes 45 ans) m’a manqué comme l’education et la presence d’une mere, puisqu’ils ont divorcé lorsque j’avais 10 ans, restant seul avec mon pere l’affectif l’avait emporté, mon frere et ma soeur etant avec ma mere.

    Cela dit ce que m’apporte votre article c’est la reflexion sur le regard de moi meme, et en toute honnetete je ne suis pas sure de ne pas infliger aussi cette culpabilisation emotionnelle… Donc je vais y etre attentif, merci pour ce point

    Sur le fait d’accepter que chacun ait sa propre emotion, c’est pour moi une richesse, c’est l’equilibre d’une famille ou d’un groupe, je pourrai aller plus loin en ecrivant que c’est le mouvement, l’evolution, la creation pour illustrer j’ecrirai que cela evite l’immobilisation, la stagnation, la regression, l’unicité…

    Bien à vous

  • RHattitude dit :

    bel article mais la notion d’égoïsme n’est t-elle pas loin, merci d’avoir stimulé mes réflexions ce Lundi matin.

  • Manyach dit :

    Nos émotions parlent de nous OK mais les autres peuvent les influencer en nous infantilisant culpabilisation chantage affectif

  • DStricher dit :

    Et oui nous sommes tous un peu égoïste dans nos relations et un peu maso … Un article a relire souvent – Sylvaine +++

  • Tout d?abord, j?aime ton expression « d?idées fausses », car il s?agit bien de cela, dans le sens, comme tu le dis si bien, de fausses perceptions. Par exemple, on se sent responsable de quelqu?un, alors que ce n?est pas exigé.

     

    Tout cela se joue, comme tu le dis si bien, autour d?émotions; parfois, ce sont de « petites vilaines » qui aiment jouer des tours. Là où j?aimerais y ajouter un commentaire, c?est lorsque tu dis que « le père de Christophe utilise le chantage affectif pour manipuler son fils et l?amener à agir selon ses désirs ».

     

    C?est vrai qu?à la lecture de ce cas précis, le père de Christophe m?apparaît un manipulateur de l?amour et semble entretenir une relation toxique avec son fils,mais tout se joue sur les particularités de la demande du père et en quoi celle-ci est habilement voilée sous le langage de l’amour ? En autres mots, il est très important d?examiner le contexte de cette relation. Est-il un réel manipulateur ou ses communications sont bourrées de mauvaises habitudes? Est-ce un discours intergénérationnel? Je ne fais que poser des questions.


    Mais une chose est certaine et il faut le dire ouvertement et très fort, ce type de comportement est néfaste et
    consiste souvent à vouloir créer chez l?autre un sentiment de culpabilité ou de responsabilité morale. Par contre, là où il faut faire attention, c?est de dire que ce chantage affectif est toujours conscient, parce que des fois il est, comme les psychanalystes le disent, tout à fait inconscient. Dans le sens que le père ne dirait pas ces paroles avec la ferme intention de nuire, mais simplement à cause de complexes souvent fort inconnus.

     

    Outre cela, je suis absolument d?accord pour dire que ce chantage peut consister à vouloir amener le fils à agir selon ses désirs, mais je pense que parfois cela provient d?autres sources méconnues, tels la jalousie, la dépendance excessive, le manque de reconnaissance, le manque d?amour ou simplement le fait d’obtenir de son fils plus d’attention ou d’affection. C?est là où tout se complique; l?individu est tellement unique et complexe et les relations aussi, d?ailleurs.

     

    Si on s?en tient à ce cas, on peut penser que le père semble usé de chantage affectif verbal, mais qu?en est-il du chantage non verbal? Est-il plus insidieux? Qu?en pensez-vous?

  • Denis.dgc dit :

    Article surprenant, dans le sens où je n’avais pas encore envisager ce genre de situation sous cet angle. Y’a matière à réfléchir sur soi.

  • sandie dit :

    Merci beaucoup Sylvaine, voilà quelques lignes très précieuses ! Je retiens en particulier l’idée qu’on ne peut pas générer chez l’autre une émotion, idée qui permet de dissoudre la culpabilité mais aussi de responsabiliser et de clarifier ses propres besoins et envies et de les exprimer clairement dans la relation. Très écologique… Merci !

    sandie

  • Aurore dit :

    Bonjour Sylvaine,
    Mon commentaire est juste technique : les liens ne fonctionnent vers les articles associés (ex: Définir ses limites, Compétences relationnelles: établir ses limites).
    Dommage parce qu’il est toujours passionnant et enrichissant de relire certains de vos billets, ôh combien pertinents!
    Cdlt
    Aurore

    • Sylvaine Pascual dit :

      Bonjour Aurore,

      Effectivement, suite à la migration du site, certains liens n’ont pas pu être récupérés et doivent être réparés à la main, ce qui, sur plus de 500 articles, prend un temps fou! C’est la raison pour laquelle ils sont nombreux à ne pas fonctionner, et nous travaillons dur à remettre tout ça sur pied;)

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